Quelle espérance aujourd’hui?
2ème soirée : Mort / Vie
Mardi 14 février 2023
Lecture de Marc 16, 1-20
01 Le sabbat terminé, Marie Madeleine, Marie, mère de Jacques, et Salomé achetèrent des parfums pour aller embaumer le corps de Jésus.
02 De grand matin, le premier jour de la semaine, elles se rendent au tombeau dès le lever du soleil.
03 Elles se disaient entre elles : « Qui nous roulera la pierre pour dégager l’entrée du tombeau ? »
04 Levant les yeux, elles s’aperçoivent qu’on a roulé la pierre, qui était pourtant très grande.
05 En entrant dans le tombeau, elles virent, assis à droite, un jeune homme vêtu de blanc. Elles furent saisies de frayeur.
06 Mais il leur dit : « Ne soyez pas effrayées ! Vous cherchez Jésus de Nazareth, le Crucifié ? Il est ressuscité : il n’est pas ici. Voici l’endroit où on l’avait déposé.
07 Et maintenant, allez dire à ses disciples et à Pierre : “Il vous précède en Galilée. Là vous le verrez, comme il vous l’a dit.” »
08 Elles sortirent et s’enfuirent du tombeau, parce qu’elles étaient toutes tremblantes et hors d’elles-mêmes. Elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur.
09 Ressuscité le matin, le premier jour de la semaine, Jésus apparut d’abord à Marie Madeleine, de laquelle il avait expulsé sept démons.
10 Celle-ci partit annoncer la nouvelle à ceux qui, ayant vécu avec lui, s’affligeaient et pleuraient.
11 Quand ils entendirent que Jésus était vivant et qu’elle l’avait vu, ils refusèrent de croire.
12 Après cela, il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux qui étaient en chemin pour aller à la campagne.
13 Ceux-ci revinrent l’annoncer aux autres, qui ne les crurent pas non plus.
14 Enfin, il se manifesta aux Onze eux-mêmes pendant qu’ils étaient à table : il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité.
15 Puis il leur dit : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création.
16 Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui refusera de croire sera condamné.
17 Voici les signes qui accompagneront ceux qui deviendront croyants : en mon nom, ils expulseront les démons ; ils parleront en langues nouvelles ;
18 ils prendront des serpents dans leurs mains et, s’ils boivent un poison mortel, il ne leur fera pas de mal; ils imposeront les mains aux malades, et les malades s’en trouveront bien. »
19 Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu.
20 Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient.
Lancement
Quand, à la fin de l’été, nous avons réfléchi à notre thème d’année.
L’espérance s’est imposée comme une nécessité et une urgence.
Il nous a semblé que l’espérance était la bonne nouvelle à porter.
L’espérance, pas l’espoir que demain sera meilleur qu’hier !
Un sauveur nous est né, mais il n’est pas celui qui va faire les choses à notre place, il nous invite à porter la petite fille espérance pour parler comme Charles Péguy. Il vient par en bas, dans le dénuement de ses parents migrants sans place dans la salle commune. Après l’avoir accueilli à Noël sur la paille, nous allons marcher vers lui jusqu’à la croix.
Il m’a semblé que trop souvent nous sommes tentés de nous réjouir de la résurrection comme un après la mort, en sautant à pied joint par-dessus la passion et la croix. Or les évangiles témoignent du Ressuscité, mais c’est en cherchant le crucifié que les femmes puis les apôtres vont avoir l’occasion de rencontrer le Ressuscité.
Aussi nous avons retenu la finale de l’Evangile de Marc pour faire le chemin.
Ce texte est étonnant. Il comporte quatre récits.
Dans trois des scènes, les témoins sont paralysés par la peur ou ne croient pas. Les exégètes discutent de la composition de ce dernier chapitre de Marc. Pour tous, seuls les 8 premiers versets seraient de Marc, le premier rédacteur de cet évangile. Les suivants sont d’un autre rédacteur. Mais ils sont attestés dès le 2ème siècle et ils sont intégrés à nos bibles.
Aussi, je vous propose de ne pas nous attarder sur ce débat que des générations de biblistes n’ont pas réussi à trancher.
Tout le chapitre nous est donné à lire. Je retiendrais plutôt que ces hésitations traduisent la difficulté des générations successives de témoins à affronter le scandale de la mort de Jésus, confessé comme Christ.
A notre tour, acceptons d’affronter le scandale de la mort de Jésus, prophète puissant en actes et en paroles comme disent les disciples d’Emmaüs (Lc 24,19). Et de faire le chemin avec ces témoins pour entrer dans la perspective ouverte par le Ressuscité et la proclamation de la résurrection. Peut-être notre espérance va prendre des couleurs et des contours inédits !
Je vous suggère de lire ce chapitre en trois étapes :
- d’abord les femmes au tombeau,
- les deux autres manifestations du Ressuscité
- et enfin sa manifestation aux onze avec l’envoi en mission.
Je vous suggère la méthode de lecture que j’ai reçue et que je trouve féconde.
- Lire le texte à haute voix,
- prendre le temps de le relire en silence
- et ensuite de faire un premier tour de table où chacun relève une chose qui l’accroche : perle, étonnement, difficulté.
Après ce 1er tour sans débattre, tirer quelques fils pour approfondir.
Reprise après le travail en groupe
(en intégrant des expressions des remontées des groupes)
Il y a quelque chose d’inouï, d’in-croyable dans ces apparitions.
Ce texte parle d’un commencement :
v.2 « le grand matin, le premier jour de la semaine, (elles vont à la tombe) le soleil étant levé »
v.9 « ressuscité le matin du premier jour de la semaine, Jésus apparut d’abord à Marie de Magdala. »
Le rapport entre la vie et la mort se trouve bouleversé et ceci est incroyable.
Pour les trois rencontres suivantes, c’est le ressuscité qui prend l’initiative de chacune des « manifestations ».
La 1ère témoin est bouleversée par la visite au tombeau, il lui apparaît dans un 2ème temps. Marie de Magdala est caractérisée comme ayant été libérée par Jésus de 7 démons (v.9). Elle a déjà fait l’expérience de la libération que suscite la rencontre de Jésus. Est-ce cela qui l’habilite à devenir messagère auprès de ses compagnons (ceux qui avaient été avec lui et qui sont dans le deuil et les pleurs v.10) ? Ils sont encore du côté de la mort et de la perte. Elle part leur annoncer. « Entendant dire qu’il vivait et qu’elle l’avait vue, ils ne la crurent pas » v.11.
L’effondrement de ce qui les faisait vivre auparavant fait penser que tout est fini et que rien ne peut surgir de neuf. Peut-être pouvons-nous comprendre cela avec l’expérience contemporaine qui est la nôtre. Parce que notre mode de vie, nos formes d’organisation sociale sont bouleversés, nous sommes sinon apeurés, du moins inquiets. Nous identifions la vie avec le Christ, avec ce que nous espérons, comme déploiement du connu. Et nous n’arrivons pas à discerner sa présence, ni à découvrir ce qui est en train de lever, ce qui est germe de résurrection. Dans les évangiles, les mots pour parler de résurrection sont très concrets : les verbes se lever, s’éveiller. Ils sont des mots qui parlent de la vie quotidienne et non d’un extra-ordinaire. Un 3ème mot va plus dans ce sens ‘exalter’.
V.12-13 « Après cela il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux qui faisaient route pour se rendre à la campagne. » Ceux-ci retournés l’annoncent aux autres. « Eux non plus, on ne les crut pas« .
C’est toujours le Ré-suscité qui se manifeste. Cette rencontre n’est pas l’aboutissement de leur attente ! Elle est une surprise, un in-attendu.
« il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux ». Sous un autre aspect, à chaque fois, la manifestation est différente. La relation est singulière, expérience d’une rencontre particulière propre à chacun.e. La manifestation du ressuscité provoquent une mise en mouvement.
v.14 Ensuite il se manifesta « aux onze, attablés et leur reprocha leur incrédulité, la dureté de leur cœur parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient vu ressuscité. » Eux n’ont pas bougé ! malgré les annonces qu’ils ont reçues. Seule l’expérience personnelle peut véritablement mettre en mouvement !
‘Pourquoi il ne s’est pas présenté devant les grands, les savants. Il se montre aux petits à ceux qui ne sont pas crédibles’
Et il leur dit « Allez par le monde entier, proclamez l’Évangile à toutes les créatures … « .
‘Celui qui ne croira pas sera condamné. Parole tranchante et cependant Il envoie ceux qui n’ont pas cru !’ ‘Quand tu veux faire croire à une histoire, tu fait un récit crédible et tu choisis un récit crédible, il a tout pris à l’envers !’
La rencontre du ressuscité n’est pas une contemplation, elle est mise en route, elle relance du côté de la vie. Elle est aussi envoi comme témoin du ressuscité. Les témoins ne délivrent pas un contenu de doctrine, mais témoignent de la rencontre du ressuscité dans leur vie. Ils invitent à se brancher sur la vie du ressuscité, par le baptême. Les témoins ne seront pas épargnés, ils rencontreront difficultés et adversaires (comme leur maître !) : serpent, poison, rencontre d’esprits mauvais. Mais ils ne seront pas défaits.
Notre espérance n’est ni fuite de ce monde ni attente désincarnée d’un avenir meilleur, il est humble chemin sur nos routes humaines, compagnonnage, attention aux autres, prendre soin des blessés de la vie, action pour construire le vivre ensemble.
« Le Seigneur agissait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient. » v.20